Pas de bol! J’avais décidé de titrer ce nouveau billet “Je ne rougis plus devant mes tomates” tant j’étais heureuse de les voir enfin mûrir après des semaines de tergiversation, et voilà que les chutes brutales de température sonnent le glas de leur sursaut inespéré! Car oui, je dois bien l’avouer: je n’ai pas du tout assuré avec les tomates cette année. En juin déjà, c’était mal parti. La faute au fumier de cheval frais répandu en mars et dont la décomposition tardive a affamé en azote mes légumes d’été (lire billet du 22 juin J’ai merdé avec le fumier), la faute aussi au coup de froid du mois de mai qui a tétanisé durablement leurs feuilles et leurs racines.

Au retour de vacances fin juillet, le spectacle était toujours aussi navrant. Alors que d’habitude, nous retrouvons une jungle en lieu et place d’un jardin, cette fois quasi rien n’avait bougé, ni dans les serres, ni aux potagers. Pas la moindre courgette en formation, à peine quelques fleurs sur les plants de tomates. La mort dans l’âme, j’ai arraché plusieurs pieds et découvert des systèmes racinaires rachitiques, ponctués de pucerons blancs entre lesquels s’affairaient des fourmis rouges. Pour moi qui adore les tomates de multiples saveurs, couleurs et variétés, qui en rêve tout l’hiver et accompagne amoureusement leur croissance dès les semis du mois de mars, l’échec a été dur à encaisser. Pour ne pas me mettre en rogne, Christian et mes garçons ont appris à éviter le sujet et déployé une belle énergie à focaliser mon attention sur les réussites du jardin: cardons, maïs, haricots, panais, oignons, patates et poires de terre. N’empêche. J’ai quand même ressenti des pointes de jalousie quand tel ami me racontait sans pincettes ses kilos de tomates à transformer et beaucoup de sympathie envers tel autre désespéré autant que moi devant ses plants tout rabougris. Mais j’ai aussi réussi à mettre mon orgueil dans ma poche et afficher mon plus beau sourire quand on m’en a offert de généreux plateaux. Encore merci les ami(e)s!

Puis tout à coup, à la mi-août, mes tomates se sont données le mot pour prendre l’ascenseur. Il a a fallu rajouter des fils dans la serre et des piquets aux potagers. Avec deux mois de retard, le feuillage est devenu luxuriant, les fruits ronds et luisants. Le 5 septembre fût jour de liesse: enfin de quoi faire une magnifique salade avec le basilic qui se morfondait de les attendre! Depuis ce jour, à défaut d’être abondante, la récolte est régulière et suffisante. Les poivrons et les courgettes ont suivi le même élan, et comme espéré, les choux profitent enfin de la richesse d’un sol qui a fini par digérer le fumier du printemps.

Comme quoi, la nature finit toujours par rattraper nos erreurs. S’il y a encore une autre leçon à en tirer, c’est que tout vient à point à qui sait attendre. Donc ma foi tant pis si le froid et la pluie contrarient la maturation des dernières tomates: j’attendrai l’année prochaine pour aligner les bocaux de coulis à la cave.