La «gravière»
Cela n’a rien à voir avec une gravière: on n’y creuse pas pour en ôter le sable ou les cailloux! Pourtant, dans notre langage familial courant, c’est comme ça qu’on désigne ce bout de jardin truffé de cailloux, paradis des lézards, des plantes aromatiques et des papillons.
Les cailloux ne sont pas arrivés tout seul. Nous les avons amenés à grand renfort de brouette à une époque où on trouvait le bas de notre terrain trop gras, trop plat. L’idée à germer après qu’on nous ait offert deux jeunes pêchers de vigne. D’après les bouquins, il fallait les planter dans un sol plutôt pauvre et libre de végétation. Pour leur offrir ces conditions, que nous n’avions pas, nous avons remplacer à leur pied la bonne terre végétale par du sable et des cailloux, planter des bulbes de tulipes sauvages, semé des œillets des charteux et un cortège de petites plantes sauvages aux odeurs provençales qui aiment pousser en plein cagnard. Résultat: une jolie mosaïque colorée et papillonnante.
Plein d’enthousiasme, on a retroussé nos manches et agrandi la zone. Petit à petit. Mètre par mètre. Les tas de cailloux se sont multipliés. Des ronds surtout, issus du champ du paysan voisin, doux et agréables sous les pieds. En été, la gravière est le rendez-vous préféré des pollinisateurs du jardin. Syrphes, abeilles sauvages, papillons et coléoptères se croisent et se saluent dans un mélange foisonnant de plantes sauvages et horticoles. Au crépuscule, c’est le royaume des sphinx, qui s’enivrent aux corolles des népétas et des belles-de-nuit. On les observe souvent à la lampe de poche, tandis que le crapaud accoucheur joue de la flûte au pied des cailloux.