« Mais comment faites-vous pour avoir des rhubarbes aussi gigantesques ? » Cette question m’a été posée tellement de fois par nos visiteurs depuis le début de la saison, qu’elle mérite que je lui fasse une réponse à plus large échelle ! A vrai dire, je n’ai pas de recette miracle, mais c’est une évidence : sur les neuf pieds que nous avons au jardin, un seul se morfond lamentablement. Tous les autres se prennent pour des gunnéras et un à trois de leurs pétioles suffisent généralement pour faire un gâteau !

Une chose est sûre : la rhubarbe (Rheum rhabarbarum ou Rheum x hybridum) a besoin d’un sol profond et riche en éléments nutritifs. Ces conditions, nous les avons réunies dans notre sol sableux le long des allées fruitières, à proximité des mares, en lisière des haies champêtres et au pied des arbres du verger où, selon les principes du jardin-forêt, une multitude d’espèce sauvages et/ou comestibles se partagent les étages et la lumière. Nos rhubarbes luxuriantes poussent donc plutôt en situation mi-ombragée, avec le soleil du matin ou de l’après-midi, en profitant de l’ombre bienfaisante des arbres, en compagnie des framboisiers, groseilliers, rosiers, consoudes, lamiers ou fraises des bois.

Pour répondre à leurs besoins gourmands, je fertilise leur pied de temps en temps. En automne, quand toutes les feuilles ont disparu : avec une épaisse couche de paille crottée sortie tout droit du poulailler. En hiver avec des branches broyées provenant de la taille de nos haies, et tout au long de l’année avec une bonne part des déchets de cuisine qui remplissent en quelques jours notre seau de compost. Pelures d’oranges, d’oignons , de patates, fanes de poireaux, feuilles d’artichauts, marc de café,.. … disparaissent de notre vue sous les feuilles-parasol et sont rapidement recyclés par une cohorte de petits rongeurs, gastéropodes et micro-organismes. J’applique ce compostage de surface à beaucoup d’autres plantes du jardin, en prenant soin de masquer au besoin les déchets les moins esthétiques sous une épaisseur de paille. On pourrait bien sûr aussi faire pousser la rhubarbe au pied du tas de compost, mais quand on a plusieurs plants dispersés, leur apporter directement les déchets me paraît la meilleure solution ! Je n’arrose quasi jamais le pied des rhubarbes, hormis quelquefois avec de l’urine diluée, une excellente façon de leur donner à boire et à manger en même temps. Inutile de me demander quand, combien et en quel volume les apports nutritifs sont nécessaires : je n’en sais rien ! J’y vais au petit bonheur, intuitivement, en essayant de partager au mieux les seaux entre les plantes du jardin qui en ont le plus besoin.

« Vous ne coupez pas les fleurs de rhubarbe ?» Et bien pour ma part, je ne le fais jamais ! Primo parce que leurs fleurs blanches et vaporeuses sont très belles, nourrissent une kyrielle d’insectes et décorent admirablement le jardin. Deuzio parce que cela n’empêche pas nos plants de produire de nouvelles feuilles en abondance, que nous récoltons d’ailleurs encore aujourd’hui, alors que les graines garnissent déjà les hampes florales. Ceci dit, j’ai pu constater que certaines variétés plus précoces, aux pétioles rouges et aux saveurs plus douces, sont un peu moins vigoureuses et productives que les autres. Au lieu de couper les fleurs, je conseille plutôt de multiplier les variétés et les emplacements au jardin, histoire d’avoir du printemps à l’été, de la rhubarbe à consommer. Mais bien sûr, on peut aussi la planter rien que pour la beauté de ses formes plantureuses et l’ambiance tropicale qu’elle confère au jardin…

conserver la rhubarbe sans efforts

Bien sûr on peut conserver la rhubarbe sous forme de confiture, chutney, sirop, compote, etc. Mais cette année, je teste une méthode de conservation facile et sans cuisson proposée par David Latassa et Terre vivante dans la vidéo ci dessous.

En fait, il suffit simplement de :

  • remplir des bocaux à joint de caoutchouc avec des tronçons de pétiole rincés préalablement et bien tasser (personnellement je ne les épluche pas)
  • fermer, retourner le bocal et le laisser dans la cuisine dans un plat pendant quelques jours: de l’eau va s’échapper et la rhubarbe se conservera ensuite dans son propre jus.

Avec cette méthode de fermentation, la rhubarbe peut se conserver ainsi près d’une année et être utilisée tout l’hiver pour les gâteaux, crumbles et autres desserts. Je me réjouis de voir ce que cela donne!