Bien sûr, je ne parle pas de ces alignements de thuyas ou de lauriers-cerises (alias laurelles ou Prunus laurocerasus) qui tirent un rideau militaire sur l’intimité de nos jardins, mais bien de haies champêtres pleines de vie. De celles qui se métamorphosent au fil du temps, régalent les insectes et les regards qui s’y attardent. De celles qui empiffrent les oiseaux, recèlent des hérissons et s’offrent en bouquets joyeux du printemps à l’automne.

Par chance, les thuyas n’ont plus la cote : sécheresse, champignons et buprestes font de très vilaines taches brunes dans leurs rangs. Les lauriers-cerise par contre tiennent toujours le haut du pavé dans les quartiers de villas, plébiscités pour leur intérêt à pousser vite et à garder leur feuillage toute l’année. Il faut savoir pourtant que ces arbustes originaires d’Asie mineure sont classés officiellement sur la liste noire des espèces envahissantes, au même titre que la renouée du Japon ou la berce du Caucase. Ils ont en effet une fâcheuse tendance à s’échapper en forêt, où ils forment des massifs denses et supplantent la flore indigène. A défaut d’interdire la vente des lauriers-cerises dans les jardineries (cherchez l’erreur!), les services cantonaux et communaux ne ménagent pas leurs efforts pour les arracher sur le domaine public. Décidées à favoriser la biodiversité, la plupart des grandes villes romandes encouragent aussi les propriétaires de jardins privés à remplacer thuyas et laurelles par des haies vivantes, et mieux encore, les aident financièrement pour l’arrachage et les nouvelles plantations. C’est le cas notamment depuis deux ans à Lausanne et à Yverdon.

Par quoi les remplacer ? La palette des arbustes indigènes est très large, mais autant être franche: à moins d’opter exclusivement pour du buis, de l’if ou du houx -ce qui a peu d’intérêt écologique et paysager-, une haie champêtre n’isole pas toute l’année du regard d’autrui. Pour ma part, je la trouve plutôt conviviale en hiver, quand elle ouvre ses fenêtres à la chaleur des passants.
On choisira les espèces qui la composent en fonction de la place à disposition, de l’esthétique et/ou de la petite faune que l’on souhaite soutenir. Il y en a pour tous les goûts!

Pour les oiseaux
sureau noir, aubépine, églantier, viorne obier (bouvreuil), viorne lantane, troène, cornouiller sanguin, prunellier, cornouiller mâle

Pour les pollinisateurs
saule marsault, églantier, viorne lantane, cornouiller sanguin, chèvrefeuille des haies, aubépine, prunellier (épine noire), fusain, noisetier

Pour les papillons et leurs chenilles
nerprun purgatif, saule marsault, prunellier, chèvrefeuille des haies, sureau noir

Pour nos papilles
sureau noir, amélanchier, cornouiller mâle, églantier, aubépine, prunellier

Pour la vannerie sauvage
viorne lantane, saule, cornouiller sanguin, noisetier

Pour la beauté des fruits
fusain, viorne obier, prunellier, églantier, aubépine

Où se procurer les arbustes indigènes?
En Suisse romande, on les trouve facilement dans les pépinières forestières (par ex. La pépinière de Genolier) et vu la demande en hausse, de nombreuses jardineries en proposent aussi dans leur assortiment. Pour vous assurer qu’il ne s’agit pas d’une variété horticole, vérifier son nom latin: il doit être composé de deux mots uniquement (genre et espèce). Pour ce qui est de la plantation, je ne vais pas réinventer la roue: vous trouverez en bas de page des liens vers des documents plein d’informations et de bons conseils (exigences écologiques des espèces, règlementation, entretien,…). Un seule chose à rajouter:  n’hésitez plus à vous lancer, novembre est le meilleur moment pour planter!

Pour terminer ce billet en images et en poésie, je vous laisse en compagnie d’Antoine dans sa vidéo dédiée aux haies sauvages, tournée l’automne dernier dans notre jardin. Bonnes plantations et à tout bientôt!

 

Programmes d’aide financière au remplacement de haies horticoles par des haies d’arbustes indigènes

En savoir plus sur les espèces, leur plantation et leur entretien