Rassurez-vous, elle n’est pas toute seule. J’en rencontre régulièrement, mais je n’ai encore jamais assisté à un meeting ou un rendez-vous amoureux. Son petit nom? La mygale à chaussette, alias Atypus affinis, l’une des trois espèces de mygales qui existent en Suisse. Brrrrr, je sens un frisson vous envahir, chers lecteurs. Et bien oui, il s’agit bien d’une araignée poilue et venimeuse, mais à la différence de certaines de ses cousines sud-américaines, elle ne mesure guère plus de 15 mm et sa morsure n’est pas plus douloureuse qu’une piqûre d’abeille. Ceci dit, je n’ai pas testé: je préfère ne pas la chatouiller et enfile une bonne paire de gants s’il faut la déplacer.
Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire de chaussette? Lorsque je la déloge, souvent lors de nouvelles plantations d’automne dans la prairie, c’est que je suis tombée sur sa chaussette. La première fois, cela surprend: on aperçoit une masse informe qui remue façon fantôme derrière une membrane sale. Quand on tire sur la chose, on découvre une sorte de sac allongé, de 6 à 10 centimètres, d’où surgit brusquement une grosse araignée immaculée, parée d’une tenue pourpre soyeux qui force au respect. Ses crochets venimeux (ou chélicères), orientés à la verticale ne laissent planer aucun doute sur la généalogie de l’animal: c’est bien une mygale. La charmante bête a pour habitude de prolonger sa galerie souterraine déjà tapissée de soie, d’un long manchon tricoté au ras du sol et soigneusement camouflé avec un peu de terre et des débris en tous genre: la mygale s’y tient à l’affût et dès qu’un mille-pattes, un carabe ou toute autre petite bête insouciante vient à marcher sur la chaussette, l’araignée passe à l’attaque, transperce sa proie et la tire progressivement à l’intérieur non sans déchirer la soie qu’elle raccommodera ultérieurement.
Je n’ai pas trouvé grand chose concernant la répartition de cette espèce en Suisse sur le site d’infofauna: on m’a confirmé que, les araignées n’étant pas très « sexy », les moyens financiers manquent aux chercheurs pour mieux les étudier. Mais je présume que ma mygale, liée aux coteaux secs et chauds du pied du Jura, du Valais et du Tessin, n’est pas si fréquente et je suis ravie de l’accueillir dans mon jardin, au même titre que les couleuvres dans la mare et les crapauds sous les cailloux. Je la vois comme une récompense pour tous nos efforts accomplis en faveur de la biodiversité, petits gestes ou travaux d’envergure…
Envie d’en savoir plus?
Voici une vidéo tournée au printemps par Antoine qui vous montre l’émancipation des jeunes mygales…
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