Dans l’esprit populaire, la guilde évoque plutôt une corporation moyenâgeuse, plus ou moins élitiste, plus ou moins secrète, dont les membres se rencontrent dans des salons feutrés et discutent gros sous et privilèges. Rien à voir avec les plantes. Mais en permaculture, ce terme désuet désigne pourtant un éventail d’espèces que l’on associe à un endroit donné avec l’espoir que, au mieux, elles cohabitent et interagissent positivement et que, au pire, elles se supportent poliment.

Je me suis pliée à cet exercice à moultes reprises depuis 2016, afin de remplacer l’herbe qui poussaient sous nos arbres fruitiers par une végétation multi-étagée digne de notre rêve de jardin-forêt. Je suis restée perplexe aussi, face aux guildes clé -en-main suggérées sur le net et associant des plantes pas toujours adaptées à notre climat, notre altitude et notre sol très calcaire… J’ai donc fini par y aller au feeling, en réfléchissant surtout aux besoins de chacune des plantes en terme d’exposition, d’humidité et d’espace, mais en veillant aussi à l’esthétisme de l’ensemble et au côté pratique, quand il s’agit d’aller cueillir des cerises ou picorer des cassis.

Histoire d’illustrer mes propos, voici l’exemple une guilde installée en 2021 sous un pommier Gravenstein âgé de 22 ans.

Les différentes espèces ont été installées plus ou moins en même temps, après avoir ôté l’herbe qui poussait sous l’arbre à l’aide d’une grelinette, recouvert le sol de cartons et délimité la surface de plantation avec des grosses branches ou troncs couchés de chêne. Les plantes nécessitant le plus de soleil ont été placés côté sud de la couronne, mais ne souffrent pas d’un soleil trop violent, ce qui convient particulièrement bien aux petits fruits et à la rhubarbe. Les autres sont disposées à l’ombre ou à la mi-ombre.

  • Petits fruits: josta et groseiller rouge (ou raisinet)
  • Plantes herbacées: menthe chocolat, consoude, chou vivace de Daubenton, ligulaire dentée, géranium sanguin, iris fétide

De nombreuses espèces sauvages sont venues combler les vides spontanément. Hormis le chiendent et la benoîte (Geum urbanum) passablement envahissante, la plupart sont les bienvenues. On y trouve notamment le lierre terrestre (Glechoma hederacea), le géranium herbe-à Robert (Geranium robertianum), l’épiaire des marais (Stachys palustris), l’arum tacheté (Arum maculatum) et le fusain (Evonymus europaeus).

Et les fixateurs d’azote? Il est souvent recommandé de planter dans la guilde au moins une espèce végétale dont les racines accueillent des bactéries capables de fixer l’azote atmosphérique du sol, ceci afin de rendre le sol plus rapidement autofertile. Je n’en ai pas mise sous cet arbre par manque de place, mais ailleurs, j’ai installé à plusieurs endroits l’hippocrépide buissonante (Hippocrepis emerus), qui supporte bien l’ombre sèche. Ceci dit, les plantes dites « fixatrices » ne sont pas les seules pourvoyeuses d’azote dans le système: cet élément indispensable à la croissance végétale retourne aussi au sol au via tous les déchets qui y tombent: feuilles mortes, branches, fientes d’oiseaux et de petits rongeurs, etc…

En résumé: plus il y a de plantes différentes, plus il y a d’eau, plus il y a de vie… et mieux ça pousse!

Composer ses guildes.. à la carte

Pour apprendre à connaître les besoins des espèces végétales et les associer au mieux au jardin, je vous recommande le Kit Caragana conçu et mis au point par le centre de formation agro-écologique des Alvéoles. Ce kit est composé de 160 fiches de plantes du jardin-forêt, présentant leurs caractéristiques (hauteur, volume, …), exigences écologiques, rusticité, utilisation, intérêt pour la biodiversité,…   Un outil malin auquel on prend goût rapidement.

Kit Caragana160 fiches de plantes- https://alveoles.fr/